Syna Nishimura, Duchesse à Aluksen Enkelit.

Une telle question ne se pose pas à une dame. Enfin je vais tout de même avoir la politesse de vous répondre qu'en effet je suis une jeune fille plutôt facile à vivre.
Comment ? Moi, modeste ? Non juste réaliste. Vous savez, quand vous êtes une fille de bonne famille, vous vous devez d'être un exemple qui reflète l'image de rang royal. Je suis facile à vivre que selon mon propre point de vue qui, bien sûr se justifie. Vous n'en diriez pas autant si vous auriez vécu quelques années à mes côtés, à moins que je sois aussi gentille que je le prétend. Je suis la bonté d'âme elle-même. Enfin j'exagère un petit peu, il se peut que certaines fois je sois un tant soit peu capricieuse. En même temps il faut dire que j'ai toujours vécu avec ce que je voulais. Mais mon apparence n'est pas à juger, seul ce qu'il y a au fond de mon cœur compte. J'ai toujours joué le jeu de la petite noble, et il me sied si bien qu'à force j'en deviens désagréable. Seulement ne me pensez pas peste ou bonne fille de famille. Je suis comme vous, avec des sentiments et des envies.
Quant à ma personnalité quotidienne, je chante dès que je suis seule. J'aime aussi faire quelques farces. Eh bien ? Vous n'avez jamais vu une duchesse s'amuser ?! Il faut bien rire quelques fois ! Méfiez-vous, je ne suis pas qu'une farceuse, je suis bien plus fourbe que vous ne pourriez le croire.

Encore des questions indiscrètes ! Bientôt fini oui ? Enfin je ne vais pas jouer ma rabat-joie. On va dire que je suis de taille plutôt normale. Je dirais un mètre soixante-sept pour cinquante-cinq kilos. C'est très mince pour ma taille mais pour mon statut c'est limite en surpoids. Mère m'obligeait à rentrer dans des corsets très serrés. Une Duchesse se doit d'être présentable, et par la même occasion parfaite. Tous les matins dans les environs de cinq heure, deux de mes servantes venaient m'habiller. Mère traitaient ces jeunes filles comme des moins que rien et ne leur rendait pas la tache facile. Je haïs cela. Et depuis que je suis sur l'Aluksen Enkelit, j'ai mes robes noires avec des corsets réglés comme je le souhaitais. J'ai pu reprendre de la chair sur les os.
Ah oui ! Aussi j'ai les cheveux gris de naissance ainsi que des yeux rouges vifs. Cela reste inhabituel mais la génétique est aléatoire et surprenante. Je m'habille quasiment tous les jours en noir. Le noir est ma couleur -si on l'appelle couleur- préférée. Mère m'interdisait cette couleur à la cours, car elle était associée au Malin. Que de balivernes ! Mère s'est encrée dur comme fer des idéologies que je qualifierais de complètement insensées. Depuis que je suis seule sur ce navire de croisière, j'ai décidé de rester moi même et donc je porte toujours des robes à corset et je noue mes cheveux à l'aide de deux flots laissant découvrir mes deux grandes boucles anglaises naturelles.
J'ai tout de même comme beaucoup de femmes, une passion pour les chaussures. Mes préférées restent de simples escarpins noirs vernis.

J'étais née un vingt août sous un soleil resplendissant. Mon père avait fait venir des médecins au château de Versailles pour cette occasion. Je pesais trois kilogrammes et mesurais cinquante-deux centimètres. À vrai dire, ce sont des détails insignifiants. Pas pour les parents vous diriez ? Et bien les miens n'en ont rien à faire. J'étais la sixième enfant de la lignée Nishimura, une famille de noble. Mon nom de famille ne fait pas du tout noble, et encore moins Français. Mes parents n'ont jamais pris la peine de m'expliquer l'origine de ce nom de famille étrange. Pour moi, la maternité c'est inexistant ou du moins c'est envahissant. Ma mère s'est occupée de moi jusqu'à ce que je n'ai plus eu besoin d'être allaitée. Ensuite ce sont les «bonnes » du château qui avaient prit la relève. Mère était insupportable et mon père était occupé à ses taches professionnelles ou plutôt à aller rendre visite à certaines filles de joie.
Ma sœur Andie m'a élevé jusqu'à ce que je devienne assez grande pour subir la dictature de mère. Andie a préparé ma vie, ce à quoi je devais m'attendre avec mère, elle m'a apprit les bonnes manières, et surtout d'aimer avec son cœur pour ensuite être aimée à son tour.
Lorsque j'eus atteint ma douzième année, mère s'occupa de mon apprentissage, comme à mes deux plus grandes sœurs.
C'est à partir de ce moment là, que ma vie commençait à être bousillée. J'étais exploitée pour devenir à mon tour une mégère à la poursuite du plus haut rang de noble possible. Mère m'instruisait à l'art d'être parfaite pour pouvoir accéder à l'apogée de la célébrité. Que de sottises. Tout ce que je voulais c'était vivre une vie tranquille avec un homme et une famille à aimer. Ici, nous devions nous faire courtiser par un noble. Enfin, ce sont nos parents qui voulaient que nous nous fricotions, juste pour une dot et un rang social.
C'est pourquoi père fréquentait d'autres personnes hautement placées, et que mère était sans arrêt au théâtre et à l'opéra. Je ne voulais pas aller là-dedans, l'opéra c'est trop ennuyant. Et pour cause ma sœur et moi écoutons de nouvelles musiques et nous nous entraînons à l'exercice du chant. Tout en grandissant je me suis forgée toute seule mon caractère. Et cela allait de mal en pis. Plus je découvrais la société et leurs manières de faire, plus j'avais une envie de me rebeller. Seulement j'étais destinée à cette vie, alors j'ai du jouer le jeu et lors de ma quinzième année, j'ai été destinée à être mariée à un homme.
Un vrai cauchemar, je ne voulais en aucun cas de cet homme. Il était hideux, aussi bien de l'extérieur que de l'intérieur.
Andie avait aussi été mariée à un homme, et après quelques temps elle a du s'en aller pour fonder à son tour une famille non désirée avec compte.
Suite à l'annonce de la date du mariage, qui se ferrait lors de ma dix-huitième année, ma sœur ne voulait pas que je vive la même horreur qu'elle et me donna toutes ses économies afin que je puisse embarquer dans ce merveilleux navire où tout le monde rêvait de vivre. Ce navire était la destination d'une nouvelle vie.

Cela fait maintenant trois années que je vis à bord de l'Aluksen Enkelit. Le temps passait beaucoup plus vite qu'au château. Quand on prend plaisir à vivre dans un endroit, on ne voit plus le temps défiler. Ici, je n'ai pas réussi à perdre mes habitudes de noble implantées par mère. Mais au moins, je suis libre comme l'air. J'ai gardé l'habitude vestimentaire, mais j'y ai juste changé la couleur. C'est exactement la même chose pour mon caractère, d'apparence de petit noble capricieux mais au cœur d'or.
Enfin mon séjour n'est toujours pas terminé, et tout peut encore arriver. En espérant que seules les bonnes choses peuvent survenir, et que jamais je ne sombre dans la méchanceté.