Une tasse de thé chère amie ? <Avec Syna Nishimura>

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Un bon thé bien chaud.. Un délice anglais.

L'horloge affiche les environs de seize heures. Heure du thé anglais. J'aime cette tradition raffinée. J'aime cette ponctualité dont les saxons font preuve. J'aime ce petit rituel vivifiant. Un rituel calme, apaisant. Un rituel dont il faut profiter. Il faut avaler les quelques minutes goulûment. Avaler cet instant comme on avale distinctement le thé qui nous coule chaudement dans la gorge. Le thé brûlant, empli de saveurs qui parcourent vos papilles et font frissonner vos narines. Le thé dont la vapeur vous embaume, vous transporte dans un autre monde, plus doux, plus moelleux, plus chaleureux. J'apprécie les anglais pour ce moment qu'ils savent s'offrir. Moment de délicatesse et de volupté.

Mon père s'est lui aussi prêté au jeu. Il boit docilement sa boisson, la délectant sans bruit, dans un silence à la limite du religieux. Il l'interrompt quelques fois, pour répondre aux rares personnes venant le déranger dans ce moment de paix. Il répond avec un calme absolu, une voix forte, grave, posée. Une voix qui révèle toute la suprématie. Entourée des dames, j'admire ce personnage divin. Je l'admire sans bouger, sans parler, sans entendre. Je m'éloigne de la réalité pour planer de passion.
Je passe de longs moments avec ces dames raffinées. Ces dames que je n'écoute plus quand la beauté de mon paternel s'éveille. Pourtant, ses dames loin d'être sottes sont intéressantes. Elle parle de mode, d'économie, de ragots, de politique. Je crois, sans être certaine, que les femmes ont la capacité de varier leur conversation en y mêlant des thèmes inutiles. Ainsi, on se penche un peu plus sur le fond de leurs paroles, attendant le moment du long discours sur la nouvelle crise. Ce mélange donne une importance aux dires intellectuels qu'elles peuvent avoir. Ainsi, les hommes les croyant bécasses sont plus enthousiastes et surpris de les voir tenir des propos si cohérents. La femme est un être bien malin. Son comportement en est la preuve.

J'entretiens donc une discussion avec elles, tout en buvant religieusement mon eau chaude aromatisée. Je regarde avec admiration leurs belles coiffures, admire leurs lèvres rosées et délicates. Ces lèvres mouvantes, sans aucune interruption. Elles sourient, un sourire éclatant rempli de dents blanches. Je ne sais pas parler comme elles, pas encore. Je ne sais pas me tenir comme elles. Je n'ai pas encore leur assurance. Pour cela, je me sens toute petite dans ce groupe.

Je parcours la pièce des yeux. Je ne vois personne susceptible de m'accueillir. Je reviens donc au blabla continu sur la nouvelle France et ses aléas. Je ne connais pas ce pays. Je n'y suis jamais allée. Mais il paraît qu'il est beau, plein de paysages merveilleux. Il paraît que sa capitale est somptueuse, que ses monuments sont grandioses. Que son histoire est légendaire. Mais il paraît aussi que les français sont froids, hautains et désagréables. Ceci enlève un charme certain à ce beau pays latin.

Je termine ma réflexion. Mon regard sillonne une nouvelle fois le beau et grand salon. Soudain, j'aperçois à l'entrée une chevelure blanche, rayonnante. Une chevelure que j'assimilerai tout de suite à celle d'une vieille femme si l'inconnue ne s'était pas retournée et n'avait pas montré son jeune visage. Je souris, fière de cette vision. Je bois la dernière gorgée avec empressement, quitte solennellement les bavardes et me dirige vers l'arrivante. Mon pas est rapide. Presque trop et j'espère ne choquer personne. Surtout pas toi, je ne veux pas te faire peur. J'arrive devant tes yeux en arborant un sourire jovial.

« Bonjour ! Que fais-tu par ici ? »

Je marque une courte pause puis reprends avec enthousiasme.

« Puis-je t'apporter un peu de compagnie ? »

Sans attendre de réponse, de peur d'un quelconque déclinement d'offre j'ajoute.

« Ça te dirait une tasse de thé ? »

Puis je montre de ma main droite, trois petits fauteuils vides entourant une table en cerisier vernis.

Une jeune fille spontannée.

Aujourd'hui est une nouvelle journée qui n'attend que de passer. Tous les jours, je passe mes matinées à la verrerie, puis vais à la bibliothèque lire des livres. Seulement quatorze heure passé, je ne sais jamais comment m'occuper. A vrai dire, je traîne toujours un partout, du moins dans les endroits que je connais. Et des endroits que je connais, il y en a très peu. Je ne sais pas du tout où me rendre pour occuper ma fin de journée. Fin de journée ? Mais non il n'est que quatorze heure j'ai dit. Le temps passe si lentement désormais. Je suis libre comme l'air mais je ne sais pas quoi faire. Il faut que je trouve de quoi m'occuper. Et si je vais chanter à l'auditorium, pour être accompagnée de musiciens cette fois-ci ? Je trouvais mon idée plutôt bonne mais je ne voulais pas y aller dans une tenue trop extravagante, même si c'est dans mes habitudes d'être habillée comme ça. Je voudrais aller me revêtir d'une robe simple, et lisse, avec son tissu de toile noir posé sur ma peau, parcourant toute la longueur de mon corps et s'arrêtant à mes chevilles, laissant découvrir des sublimes petites chaussures à talons elles aussi noires.

Je me dirige donc vers ma chambre, à pas lents, en prenant le temps d'observer tout ce qui se trouve autour de moi. Je suis sur le pont, et je viens de sortir de la bibliothèque. Il y avait beaucoup de monde ici, alors je me met tout de même à accélérer le pas, car tous ses gens ne font jamais attention aux autres, ils te compressent, te fonce dedans, ne t'adresse même pas un seul pardon. Enfin j'arrive près des escaliers pour monter au second étage, là où se trouve ma chambre. Arrivant sur place, la fatigue arrive et mes yeux sont devenus tout bouffis. Je me suis assise sur mon lit afin de me reposer et ne pas vaciller. Seulement mes yeux eux, s'étaient fermés sans que je le veuille.

Je me réveille. Je regarde l'heure et il est quinze heure et quarante minutes. J'ai dormi une heure et demi, mais au moins je ne me sentais plus fatiguée. Fatiguée, ou du moins blasée de passer des journées qui n'attendent qu'à être passées. J'en ai marre de cette routine, il faut que je la casse. Je m'habille donc puis sort de ma chambre. Je décide de me rendre au troisième étage, là où je ne me suis jamais rendue car je n'avais plus envie d'aller à l'auditorium. Je ne voulais jamais être au contact de d'autres passagers, lorsqu'ils savaient qui j'étais il me regardait comme si j'étais un monstre. Enfin peut importe cette fois-ci je m'en vais les affronter, quoi qu'ils en pense je veux découvrir de nouvelles choses sur ce navire !

Mes talons résonnent à chaque marches que je monte. Mes pas sont encore plus lents, et j'arrive enfin au troisième étages. Il était immense, et il ouvrait sur trois salles. D'un côté se trouvait un restaurant, de l'autre un endroit emplit de fauteuil, de table, de chaises etc... Et la troisième était vide, plongée dans l'obscurité. Ce devait être une salle spéciale pour des occasions. Enfin je n'ai pas envie d'aller au restaurant à cette heure-ci. Je préfère aller dans ce salon, qui en ce moment même est devenu un salon de thé. J'en déduis par cela que beaucoup d'anglais était présents, où du moins, beaucoup d'adepte à leur mode de vie buvait un thé, avec le petit doigt en l'air, comme me l'avait apprit mère lorsque je devait moi aussi boire dans une tasse. Je lève alors l'une de mes jambes et la posa sur la petite marche qui séparait le hall de l'étage, et le fameux salon. Alors que je commence à me retourner pour chercher une place à occuper, une jeune fille avec deux couettes comme moi mais portées basses, de couleurs châtain s'approcha rapidement vers moi, très rapidement. C'est la première fois qu'on se précipite vers moi, surtout à cette vitesse.

-Bonjour ! Que fais-tu par ici ?

Je suis surprise qu'on me demande cela. Je ne savais pas quoi répondre, j'aurais l'air bête de dire, et bien je suis venue pour la même raison que toi, alors que c'est la première fois que je met les pieds ici. Alors que je ne réagis toujours pas la fille qui m'a parlé ne me laisse pas le temps de répliquer et enchaîne.

-Puis-je t'apporter un peu de compagnie ?

C'est bien la première fois qu'on me demande ça. Et bien dit donc je crois que finalement venir ici n'était pas une si mauvaise idée. Rare sont les personnes osant m'aborder de la sorte. Le seul qui m'avait étonné en venant me parler était ce garçon que j'ai rencontré à la verrerie, près des roses.
Encore une fois elle ne me laissa pas le temps de répliquer. Si ne serrait-ce une fois, j'aurais osé faire ceci à mère, depuis longtemps j'aurais pris une correction. Enfin j'étais pas ici pour ressasser sans arrêts le passé, il faut que je franchisse le pas d'une nouvelle vie, et d'un nouveau mode de comportement, même si cela ne va pas être si simple que ça, étant donné que ça fait trois ans que je m'y essaie.

-Ça te dirait une tasse de thé ?

Elle se retourne et me montre trois chaises accompagnant une table vernis taillée dans un cerisier. Au moins cette jeune fille avait du goût. Je m'avançais donc afin de m'asseoir dans ses magnifiques chaises. Je n'ai jamais pris de thé à quatre heure mais pourquoi pas changer un peu nos habitudes ?
Alors que je me sens gêné de ne pas trouver quoi dire à la jeune fille, je me mis à lui sourire tout en l'observant. Elle a l'air pas plus jeune que moi. Elle est mince, et avait les yeux semblable à ses cheveux. Elle était habillée de manière élégante et elle me sourit elle aussi avec entrain. Les thés que la jeune fille a demandé sont arrivés, un jeune serveur les a déposé sur la table qui se trouve devant nous. Alors que j'attends que ceux-ci se refroidissent, je décide tout de même par politesse et respect d'engager à mon tour la conversation.

-Cet endroit est vraiment beau, je ne suis jamais venue ici. Et toi tu viens souvent ?

Minable. Ce que je viens de dire est minable. Vraiment, c'est pas ça qu'on dit pour la première fois à quelqu'un. Enfin j'espère qu'elle ne me trouve pas nulle parce que c'est ce que je suis en ce moment.

» Syna Nishimura, Duchesse à Aluksen Enkelit.